Les Mots dans l'oeil de Barbara Bonneau



Les Mots dans l'oeil

 

L'autisme, la dysmorphophobie, le capitalisme, la certitude, le discours, les dérives sectaires, l'état limite, Freud, l'holophrase, l'Homme aux loups, l'hypochondrie, l'image spéculaire, Lacan, le langage, le lien social, la malaise dans la culture, le mathème, la névrose, l'oeil, la politique, les phonèmes, le plagiat, la psychose, le regard, la religion, le rêve, le savoir, la schizophrénie, le signifiant, la signifié, la signification, le sens, la vérité... 

 

Bienvenue dans ce site que je voudrais proposer éventuellement comme lieu d'hébergement dédié aux cliniciens qui font aussi de la recherche ou de l'écriture et souhaitent partager leurs travaux.

 

C'est peut être un vaste projet.

   

Néanmoins, ne trouvant pas facilement un lieu pour publier mes propres textes, je pourrais au moins le faire ici. Les textes que je présente parviennent d'une sélection de travaux effectués depuis 1991, suite à une rencontre avec un homme hospitalisé en psychiatrie qui m'a posé une question. Sa question est devenue la mienne, en quelque sorte. Elle touche ce qui est le plus originel chez le sujet : sa vérité. Cette vérité est liée à son image, à priori, depuis sa rencontre avec le langage. 

 

Sa problématique s'articulait autour de ce qu'il appelait des trous dans son visage. Chez les psychanalystes français ce "signe" s'appelle le plus souvent "Hypochondrie", un choix de terme qui démontre parfois une méconnaissance, chez certains, d'un terme utilisé par un des correspondants de Freud, l'Italien Enrico Morselli, en 1891: dysmorphophobie. Morselli décrivait ce "signe" d'un point de vue "naturaliste", c'est-à-dire sans vouloir attacher ce phénomène à autre chose que l'observation elle-même. Quant à Freud, il employait le terme d'hypochondrie, suivant la tradition Germano-helvanique. Le terme dysmorphophobie (ainsi que le phénomène qu'il recouvre) se rencontre aujourd'hui surtout en psychiatrie, amenant le médecin presque inévitablement vers un diagnostic de psychose. Je continue de l'utiliser pour deux raisons:

1) Pour remettre en question le diagnostic systématique de psychose. La dysmorphophobie peut exister en certaines circonstances dans d'autres structures, y inclus la névrose.  

2) Parce que le terme prend en compte l'image. L'image se situe, me semble-t-il, dans un autre sphère que les sensations. L'hypochondrie se réfère davantage aux sensations.

 

L'étude de ce phénomène m'a amené à étudier le langage du sujet. Peut-être que le fait d'être moi-même anglophone m'a sensibilisé aux petites différences de prononciation chez le sujet. L'interrogation de ces phénomènes, de langage et de l'image, a abouti à des précisions concernant ce qui pourrait être considéré comme originaire chez tout sujet. Pour cette raison, ces conclusions permettent de réfléchir aussi sur  l'origine du langage, l'origine de l'image spéculaire, l'origine du corps, ainsi que sur l'autisme. Ceci dit, l'écoute du sujet n'a pas été conditionnée par un savoir. Le psychanalyste incarne la place de l'objet a sans aucune pensée de ce que le sujet va dire. 

 

Certains langages sont dits "holophrastiques". Une holophrase est une sorte de mot-phrase ayant une signification globale. Le psychanalyste Jacques Lacan définit l'holophrase par un petit mathème : S1S2. D'après cette définition, l'holophrase est composée d'un premier signifiant, dans le sens originaire, avec un deuxième signifiant. C'est le deuxième signifiant qui fait "exister" le premier comme étant premier pour un sujet divisé. Cependant, S1S2 sont coalisés dans l'holophrase. Les effets de cette gélification retentissent sur le sujet, sur son langage et sur la formation de son "symptôme".  

 

Cette holophrase "ressemble" structurellement à un autre concept de Lacan, celui de la certitude. La certitude est dans ce sens le résultat d'une "indivision" du sujet; indivision entre le savoir et la vérité. Les conséquences de ces conclusions, en apparence simples, me semblent assez vaste. Elles prennent en compte le poids du langage sur le sujet ainsi que les enjeux des échanges d'objets, y compris des objets que la psychanalyse a pour habitude de traiter. Ainsi à partir de ce petit mathème pour l'holophrase, nous pouvons prendre en compte le lien social ainsi que "la malaise dans la culture", et étudier les effets de ce lien sur le sujet. 

 

 

   

 

 

Nb. Parfois j'analyse des phonèmes. Dans ce cas les signifiants ne sont pas là pour offenser. Il s'agit des paroles vraies de personnes qui, par leurs dires, apportent un savoir sur eux-mêmes.